Lens : Sous la rocade sud, le sang des innocents.

Publié le par Action Antifasciste Artois: Bassin minier en force

Un fascicule offert par la Ville de Lens, et réalisé par le service des archives et le service de la communication, intitulé "Déconstruction, Reconstruction, regard sur le patrimoine urbain lensois à travers les archives", accompagne l'exposition qui s'est achevée hier, dans la galerie du Colisée.

Ce document retrace à travers des photographies, plans et textes, les transformations du paysage lensois au cours du 20ème siècle, notamment suite aux guerres mondiales et à l'arrêt de l'exploitation minière.

 

La volonté de la mairie est de montrer les difficultés que la ville a surmontées.

 

Ce document s'attarde largement sur l'évolution de l'architecture, des immeubles, des propriétés baties et détruites, mais décrit peu le sort des êtres vivants au cours de cette période. Les bourgeois s'interessent peu à la vie, c'est certain.

 

C'est le constat qu'on peut faire en lisant le chapitre qui raconte l'histoire des abattoirs municipaux. Celle-ci commence après la première guerre mondiale.

 

L'abattoir municipal lensois n'était alors plus suffisamment grand pour fournir les communes environnantes.
En novembre 1919, la mairie met en place un bâtiment supplémentaire, de manière provisoire. La construction d'un nouvel établissement est confiée à l'architecte douaisien, Jean Goniaux.

La construction du nouvel abattoir démarre au mois d'octobre 1923, sur un terrain situé rue Van Pelt.

Le bâtiment tient une place stratégique.  Le canal permet la circulation des animaux, une gare d'eau était même envisagée à l'époque. La gare ferroviaire du Marais est aussi un autre moyen de circulation, sans compter l'ouverture du bâtiment sur trois rues.

Cette construction a permis de rendre les locaux plus salubres et plus fonctionnels. Des pavillons en brique, dans la cour permettent la spécialisation : étables, halls d'abattage, triperies.


Un quartier entier de la ville a été organisé autour de la tuerie. L'urbanisation s'est faite alors pour permettre l'acheminement massif des animaux de la campagne vers l'abattoir, puis le transport des cadavres en dehors de la ville.

C'est une véritable entreprise industrielle de destruction de la vie qui est concentrée dans ce batiment. Rationnelle, organisée, dans laquelle chaque étape est affectée dans une salle, pour produire davantage d'effet, pour être efficace.

 

Les bourgeois organisent la destruction de la vie, c'est certain.


Mais voilà,
quelques années plus tard, la production de cadavres augmentant sans cesse, le canal est devenu un véritable égout à ciel ouvert ; les eaux provenant des abattoirs municipaux, chargées de sang, de morceaux de chair et d'organes mêlées eaux pluviales et ménagères y sont déversées.

En 1962, le conseil municipal décide de supprimer le canal. Un décret du 19 avril 1968 stipule qu'il est finalement rayé de la liste des voies navigables. En 1974, la Souchez est canalisée sous terre dans d’énormes conduits en béton afin de laisser la place en surface, à la rocade sud qui emprunte le lit de l’ancien canal.
Le 21 mars 1974, le conseil municipal ordonne la fermeture de l'abattoir. Il ne sera détruit qu'en 1994.

 

La rocade minière sud est en service depuis 1976.

 

Voici ci dessous un courrier reçu par le Maire de Lens en fonction alors. On peut y lire l'inquiétude d'une mère de famille qui craint que des enfants soient blessés par les animaux qui parfois, parviennent à s'enfuir. On devine au travers de cette lettre la peur panique qui s'empare des animaux qui approchent de l'usine dans laquelle des miliers de ces semblables ont souffert, ont été exécutés, saignés et découpés.

 

 

   

" Monsieur le Maire de la ville de Lens


Vendredi 29 mai 1970, à 13h15.


Je porte à vos connaissances qu'une nouvelle corrida a eu lieu dans les rues avoisinnantes l'abattoir, au moment où les écoliers se dirigent vers les classes, d'après-midi. Amusant spectacle lorsqu'on se trouve derrière une fenêtre ou sur le pas d'une porte, beaucoup moins plaisant lorsque des parents anxieux se demandent où se trouveent leurs enfants, malgré la présence rassurante d'une voiture de police et d'une voiture de pompier qui pourraient être utilisées à d'autres fins moins invraisemblables.

J'ose rappeler qu'en 1960 et dans le même mois, j'ai connu deux accidents de la même espèce :
• un boeuf affolé avait sauté la murette de ma cour pour atterrir sur un tas de sable que mes enfants venaient de quitter à l'instant près.
• un veau poursuivi pénétrait dans la même cour et corné, défonçait la fenêtre, pénétrait à mi-corps dans la pièce où se trouvait un bambin de quatre ans, à tel point effrayé, qu'une surveillance de médecin s'est révélée nécessaire.

A cette époque j'ai signalé à la municipalité ces déplorables faits. Pour le cas où cet écrit serait disparu dans vos archives, je pourrais vous citer les témoins : employeur, médecin et assureur, qui m'ont aidé en cette circonstance.
Depuis lors de nombreuses bêtes se sont encore enfuies de l'abattoir, sans d'autres accidents notables, je l'admets, mais faut-il qu'une catastrophe se produise pour intervenir.
La bétaillère étant entrée les portes fermées, les murs d'enceintes sans failles, par quel mystère une bête peut s'enfuir.
Je forme le voeu d'être entendu et je vous présente Monsieur le Maire l'assurance de ma profonde considération."


Nous ne voulons plus de la culture du meurtre. Nous voulons que les villes soient organisées pour permettre à la vie de s'y épanouir. Nous ne voulons plus que les enfants aient peur des veaux, ni que les veaux aient peur des humains. Nous voulons le communisme !

 

Be antifa,

Go vegan ! 

Publié dans Vie de luxe

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